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La Galerie de l'Histoire
27 mars 2017

Loménie de Brienne, luttes parlementaires et prémisses à l'orage révolutionnaire (1787-1788)

BRIENNE

Etienne-Charles de Loménie de Brienne (1727-1794), archevêque de Toulouse, était un ambitieux vulgaire, irrésolu et imprévoyant, très inférieur à Calonne, son prédécesseur. Prélat médiocre, il avait

conservé l'appui du clergé par sa déférence envers le Saint-Siège, gagné celui des novateurs par son scepticisme et il avait pu se pousser auprès du duc de Choiseul et de Marie-Antoinette.

Louis XVI, qui estimait peu son caractère et blâmait son attitude en privé, le nomma pourtant au contrôle général des Finances, sur la recommandation de son épouse et des philosophes, le 1er mai 1787.

Au lieu de présenter en bloc les édits que l'assemblée des notables avait approuvé en des termes généraux, il préféra les faire enregistrer successivement.

Les trois premiers édits portant sur la libre-circulation des grains, les assemblées provinciales et l'abolition des corvées ne rencontrèrent finalement aucune opposition sérieuse. Il n'en fut pas de même pour les deux édits relatifs à l'impôt du timbre et à la subvention territoriale.

Le Parlement, qui voyait dans les embarras financiers du gouvernement un moyen sûr de maintenir sa popularité et d'accroître sa puissance, demanda communication des états de finance (6 juillet 1787). La demande fut repoussée.

Un conseiller du Parlement, l'abbé Sabatier, s'écria tout à coup : "On demande des Etats, ce sont des Etats généraux qu'il nous faut !"

Ce jeu de mots devint comme un cri de guerre dont le Parlement s'empara. "La nation, dirent-ils dans une déclaration commune, représentée par les Etats généraux est seule en droit d'octroyer au Roi les subsides nécessaires." (30 juillet 1787)

Deux conseillers se mirent à la tête de cette opposition irréductible : Duval d'Esprémesnil, qui rêvait de restaurer les libertés du Moyen-Age et Adrien du Port, appelé à jouer un rôle dans la future Assemblée constituante.

Louis XVI convoqua le Parlement à Versailles (6 août 1787) et fit enregistrer les deux derniers édits dans un lit de justice. Le Parlement déclara nulles et illégales les transcriptions qui en avaient été faites sur les registres et formula une protestation violente qui lui valut d'être exilé à Troyes, le 11 août. 

Le roi fit enregistrer de force les édits par la Chambre des Comptes et la Cour des Aides. 

Alors, les pamphlets contre le roi, le gouvernement, la famille royale se multiplièrent. On attaqua essentiellement la reine dans des chansons où elle fut traitée de "Madame-Déficit", d' "Autrichienne". Plus tard, lorsqu'elle touchera à la plus tragique des catastropes, on l'appellera "Madame Veto". La haine fut telle que le lieutenant de police engagea la reine à ne pas se montrer dans Paris.

Brienne fut obligé de négocier avec le Parlement qui, au bout de deux mois, revint à Paris, salué par les acclamations de la foule.

Les édits sur le timbre et la subention territoriale furent abrogés. Mais le conflit avec le Parlement reprit toute son acuité lorsque le roi voulut, le 19 novembre 1787, faire enregistrer deux nouveaux édits portant création d'emprunts graduels et progressifs. Son cousin, le duc d'Orléans (futur Philippe-Egalité), protesta vigoureusement contre l'illégalité de l'enregistrement. Louis XVI répliqua, cinglant : "C'est légal, parce que je le veux !"

Mais à peine le roi se retira, que le Parlement prit un arrêt aux termes duquel que, compte-tenu que les voix n'ayant pas été obtenues en la manière prescrite par les ordonnances, ce qui venait de se passer en présence du souverain serait tenu pour nul et non avenu.

Le gouvernement était dès lors résolu à se débarasser, par un coup d'Etat, de cette opposition sans cesse renaissante et vindicative. Toutes les mesures furent prises pour ce projet fut tenu secret. Mais le conseiller d'Esprémesnil acheta à un ouvrier-imprimeur une épreuve des édits projetés qu'il communiqua à ses collègues (3 mai 1788).

Et lorsque le gouvernement envoya les gardes-françaises pour faire arrêter d'Esprémesnil et Monsabert, tous les magistrats se levèrent en criant : "Nous sommes tous d'Esprémesnil et Monsabert !"

Le 8 mai 1788, Louis XVI tint à Versailles un nouveau lit de justice pour faire enregistrer les édits qui supprimaient deux des chambres des enquêtes du Parlement de Paris, réduisant les trois autres à 67 membres en une cour plénière chargée d'enregistrer les édits et de juger les affaires en dernier ressort.  Le roi ajouta : " Dans le cas de circonstances extraordinaires où nous serions obligés d'établir de nouveaux impôts sur nos sujets avant d'assembler les Etats généraux, l'enregistrement des dits impôts en notre cour plénière n'aura qu'un effet provisoire et jusqu'à l'assemblée des dits Etats, que nous convoquerons pour, sur leurs délibérations, être statué par nous définitivement."

La publication des édits fut le signal de la plus violente opposition dans les provinces.

Assemblée de Vizilles

Au château de Vizilles, près de Grenoble (Dauphiné), 600 députés des trois ordres rédigèrent une proclamation au pays, l'invitant à refuser de payer l'impôt tant que des Etats généraux ne seraient pas convoqués (21 juillet 1788).

Le gouvernement finit par céder et suspendit l'application de la réforme judiciaire (qui comptait, outre les édits, l'abolition de la torture et des peines corporelles) et annonça, pour le 8 août, la convocation des Etats généraux.

Le Trésor était épuisé et le clergé ayant refusé à Brienne un "don gratuit" de 1 800 000 livres, le ministère, à bout de ressources, recourut à des expédients qui entrainèrent sa chute, le 25 août 1788.

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