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La Galerie de l'Histoire
12 juillet 2017

Du Président Louis-Napoléon à Napoléon III (1851-1870)

Louis-Napoléon BONAPARTE (1)

Elu à la présidence de la République le 10 décembre 1848, Louis-Napoléon Bonaparte arrivait à la fin de son mandat et selon les termes de l'article 48 de la Constitution, il lui était impossible de prétendre à une réélection immédiate sauf à laisser un intermède de quatre années. Or il aurait bien voulu se présenter de nouveau, d'autant que de nombreuses pétitions et des voeux émanant des conseils généraux approuvaient ses vues. Mais l'Assemblée rechigna et malgré tous les efforts déployés par le député Tocqueville, rapporteur du projet de révision constitutionnelle, campa sur ses positions.

Un bras de fer entre le président Louis-Napoléon et l'Assemblée s'engagea dès lors.

Le 13 novembre 1851, Louis-Napoléon fit proposer le rétablissement du suffrage universel : la majorité s'y opposa par 355 voix contre 348, oubliant qu'elle gagnait ainsi au président plus de 3 millions d'électeurs écartés des urnes par la loi de 1850.

Le président n'avait donc plus d'autre alternative, s'il voulait débloquer la crise politique qui avait éclaté entre lui et cette Assemblée obtue, que de recourir à un coup d'Etat.

  • Le coup d'Etat du 2 décembre 1851

Coup d'Etat (préparation)

Le lundi soir (1er décembre) eut lieu à l'Elysée une réception ordinaire et le président conserva un tel sang-froid que personne ne se doutait des événements importants qui se préparaient. A 23 heures, après que les derniers invités eurent quitté le palais, Louis-Napoléon monta jusqu'à son cabinet où l'attendaient déjà le général de Saint-Arnaud, ministre de la Guerre ; son demi-frère, le duc de Morny ; Maupas, le préfet de Police et le colonel de Béville, son aide de camp. Le coup d'Etat pouvait commencer.

Dans la nuit, on afficha sur les murs de Paris deux décrets présidentiels : l'un prononçait la dissolution de l'Assemblée nationale et du Conseil d'Etat, l'autre abrogeait la loi de 1850 et rétablissant le suffrage universel, convoquait les citoyens aux urnes pour se prononcer par plébiscite. 

L'état de siège fut également institué dans toute l'étendue de la première division militaire. Pendant ce temps, la troupe, commandée par le général Espinasse, investissait le Palais-Bourbon : les députés Thiers, Roger et Charras qui complotaient en vue de renverser le régime et restaurer le trône des Orléans, furent mis aux arrêts sur-le-champ et conduits à la prison de Mazas.

Au matin du 2 décembre, toutes les portes de l'Assemblée nationale étaient fermées et tous les accès qui y conduisaient barrés : la rue de Bourgogne, le pont et la place de la Concorde furent placés sous le contrôle de l'armée.

Mairie du Xe arrondissement décembre 1851

Un député légitimiste, l'avocat Pierre-Antoine Berryer, tenta, avec ses autres collègues parlementaires, d'organiser la résistance légale. Il réunit à la mairie du Xe arrondissement (aujourd'hui le VIIe), mise à sa disposition par le maire Augustin Cochin, 218 députés parmi lesquels Falloux, Montebello, Oudinot, Lauriston, Jules de Labeyrie, le duc de Broglie, Piscatory, Odilon Barrot qui avaien vainement essayé de forcer les portes du Palais-Bourbon.

Berryer y fit acclamer un décret prononça la déchéance du président Louis-Napoléon et autre annonça la remise en liberté des représentants arrêtés. Mais un détachement militaire, commandé par le général Forey, arriva rue de Grenelle et n'eut aucun mal à procéder à l'arrestation des députés et de les conduire jusqu'à Mazas où les attendaient déjà leurs collègues.

Alphonse BAUDIN 3 décembre 1851

Pendant ce temps, un autre comité de résistance, plus dur, s'était organisé à l'appel des députés républicains, parmi lesquels Victor Hugo, Schoelcher, Madier de Montjau, Hippolyte Carnot et l'avocat Jules Favre. Le 3 décembre, au faubourg Saint-Antoine, le député Alphonse Baudin se fit tuer sur une barricade après qu'une ouvrière lui avait dit ironiquement : "Vous croyez que nos hommes vont se faire tuer pour vos 25 francs ?" et Baudin avait répondu : "Vous allez voir comment on meurt pour 25 francs !"

Sur les boulevards, les généraux Canrobert et Reybel eurent tôt fait de balayer les quelques ilôts de résistance qui purent s'y trouver. Le 5 décembre 1851, au matin,  le calme et l'ordre régnaient dans Paris.

Une trentaine de départements, qui avaient la réputation de voter à gauche et qui étaient susceptibles d'abriter une société secrète républicaine, furent placés en état de siège. Des commissions mixtes, composées du préfet, d'un commandant militaire et d'un procureur, furent mises en place afin de statuer sur le sort des individus suspects arrêtés par la police ou par l'armée. Elles frappèrent  non seulement tous ceux qui, par le passé, avaient participé à des activités rebelles mais aussi ceux qui, considérés comme des "éléments pernicieux", représentaient une menace pour la société. Les uns furent déportés à Cayenne ou en Algérie, les autres expulsés du territoire français, tels Thiers, Rémusat, Edgar Quinet ou Victor Hugo, sommés de quitter la France dans les plus brefs délais.

Jules Simon en 1851

Le 7 décembre 1851, Jules Simon, qui était du nombre des proscrits, s'adressa en ces termes à ses étudiants de la Sorbonne :

"Messieurs, je vous fais ici un cours de morale, leur dit-il, je vous dois aujourd'hui non une leçon mais un exemple. La France est convoquée dans ses comices pour blâmer ou approuver les événements qui viennent de se passer. N'y eût-il qu'un blâme, je viens vous dire publiquement que ce sera le mien !"

  • La Constitution du 14 janvier 1852

Les 20 et 21 décembre 1851, des registres furent ouverts dans chaque ville et village de France et le peuple eut à se prononcer, par oui ou par non, au scrutin secret, sur la résolution suivante :

"Le peuple veut le maintien de l'autorité de Louis-Napoléon Bonaparte et lui donne les pouvoirs nécessaires pour faire une Constitution d'après les bases établies dans sa proclamation du 2 décembre".

Le plébiscite donna les résultats suivants :

7 439 216 oui

640 757 non

36 820 bulletins nuls

En conséquence, une commission fut désignée en vue d'élaborer une nouvelle Constitution. Le texte, rédigé en hâte, entra en vigueur le 14 janvier 1852.

Constitution du 14 janvier 1852

La nouvelle Constitution établissait un régime présidentiel. Le président, dorénavant élu pour 10 ans, disposait d'un pouvoir quasi-souverain : il était chef des armées, pouvait seul déclarer la guerre, conclure les traités, nommer aux emplois civils ou militaires. Il était responsable seulement devant le peuple auquel il avait toujours le droit de faire appel. Il avait seul l'initiative des lois, qu'il sanctionnait et promulguait, ainsi que les senatus-consulte. Les ministres ne dépendaient que du chef de l'Etat et chacun d'eux n'était responsable que des actes de son département. Ils ne pouvaient pas être membres du Corps législatif et n'assistaient pas à ses séances.

Le Corps législatif (261 députés) était élu pour 6 ans au scrutin d'arrondissement à raison d'un député pour 35 000 électeurs. Les sessions ordinaires duraient trois mois ; les séances étaient publiques mais, sur la demande de cinq membres, l'Assemblée pouvait se former en comité secret. Les journalistes n'étaient pas autorisés à commenter les séances mais seulement à reproduire le procès-verbal dressé à l'issue par le Président. A lui seul appartenait le droit de convoquer, d'ajourner, de proroger ou de dissoudre la Chambre.

Le Sénat (150 membres au plus) comprenait des cardinaux, des maréchaux, des amiraux et même des citoyens que le Président estimait convenable d'élever à la dignité sénatoriale. Le Sénat était vu comme "le gardien du pacte fondamental et des libertés publiques". Aucune loi ne pouvait être promulguée avant de lui avoir été soumise et il avait le devoir de s'opposer à la promulgation de celles qui portaient atteinte à la religion, à la morale, à la liberté des cultes, à l'inviolabilité de la propriété ou à la défense du territoire. Il réglait par senatus-consulte tout ce qui n'était pas prévu par la Constitution. Ses séances n'étaient pas publiques.

Le Conseil d'Etat, enfin, préparait les projets de loi. Ses membres soutenaient les débats devant le Sénat et le Corps législatif. Tout amendement était renvoyé sans discussion au Conseil d'Etat et en cas de rejet par celui-ci, ne pouvait plus être mis en délibération.

  • La marche à l'Empire

Napoléon III (2)

Encouragé par le résultat satisfaisant des élections générales qui eurent lieu le 29 février 1852 et porté par une majorité favorable, Louis-Napoléon reprit, dès la clôture de la session parlementaire, ses voyages dans les départements pour prendre le pouls de l'opinion publique. Ainsi, à Bordeaux, il prononça un discours demeuré célèbre :

"Il est une crainte à laquelle je dois répondre. Par esprit de défiance, certaines personnes disent : l'Empire, c'est la guerre. Moi, je réponds : l'Empire, c'est la paix ; c'est la paix, car la France la désire et lorsque la France est satisfaite, le monde est tranquille. La gloire se lègue bien à titre d'héritage mais non la guerre ... La guerre ne se fait pas par plaisir, elle se fait par nécessité ; et à ces époques de transition où partout, à côté de tant d'éléments de prospérité, germent tant de causes de mort, on peut dire avec vérité : malheur à celui qui, le premier, donnerait en Europe le signal d'une collision dont les conséquences seraient incalculables."

A son retour, le Sénat vota un senatus-consulte rétablissant la dignité impériale le 7 novembre 1852.

Par 7 824 189 suffrages contre 153 145, 63 326 bulletins nuls et près de 2 millions d'abstentions, le Président fut proclamé Empereur des Français sous le nom de Napoléon III et la dignité impériale déclarée héréditaire dans sa descendance directe et légitime (21-23 novembre).

Le 2 décembre 1852, jour-anniversaire du sacre de Napoléon Ier et de la victoire d'Austerlitz, Napoléon III fixait sa résidence au palais des Tuileries.

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